Les nouveaux métiers dans l'économie sociale et solidaire (ess)

On entend par Économie Sociale et Solidaire (ESS) le modèle économique alternatif qui focalise ses efforts sur des buts sociaux et culturels, là où l'économie classique reste centrée sur l'augmentation de ses profits et de son capital. Les deux modèles ne sont pas pour autant incompatibles et peuvent coexister dans un système capitaliste. La différence majeure étant que le réinvestissement du capital et des profits se fera en priorité pour améliorer les conditions de travail, promouvoir des pratiques durables… La croissance économique du modèle est donc relayée au second plan. Elle n'en est pas moins tout à fait possible.

En quoi consiste le modèle de l'économie sociale et solidaire (ESS) ?

Un modèle économique social et solidaire répond à des principes et des valeurs sociaux forts, et poursuit des objectifs à l'opposé de ceux prônés par l'économie capitaliste classique. Premièrement, l'ensemble de ces activités économiques ou financières ont une finalité sociale. Elles promeuvent une organisation démocratique et participative pour donner plus de poids aux décisions des travailleurs. Ils peuvent dès lors définir ensemble les objectifs de leur société, et décider quoi faire du capital. De manière générale, il sera réinvesti à contre-courant des capitaux injectés par les modèles économiques classiques, vers des objectifs environnementaux (maîtriser le bilan carbone de l'entreprise, lutter contre la déforestation…), culturels ou encore sanitaires. Solidarité et cohésion sont les maîtres mots de ces modèles économiques basés sur l'entraide et la coopération des acteurs économiques.

Ils sont en plus un objet d'étude à part entière, en ce qu'ils permettent d'expérimenter, de créer de nouvelles voies, de nouvelles structures, voire de nouveaux modèles, qui pourront bénéficier globalement au système économique.

Les modèles ESS se basent donc sur quelques principes fondamentaux qui font toute la différence. Concrètement, ils font primer l'humain sur le capital en réinvestissant dans un projet d'avenir ou des actions solidaires, auxquels les employés ont souscrit en connaissance de cause. La gestion participative de ces modèles offre dans les faits la possibilité à tous les acteurs de prendre part aux décisions importantes de manière démocratique. Membres actifs, employés, gestionnaires, cadres et bénéficiaires ont ainsi leur mot à dire. De plus en plus, les capitaux réinvestis le sont au bénéfice d'activités collectives, d'associations, et ont pour but de promouvoir l'intérêt général et le bien commun. De même, à un niveau plus local, les entreprises ESS privilégieront des emplois et services de proximité, pour favoriser le développement local et durable.

Toutes ces actions menées ont un impact sur la société et participent à la transition douce vers une économie plus durable. Elles luttent contre l'exclusion sociale, favorisent la création d'emplois, développent des pans du territoire jusque-là laissés de côté… Par exemple, en proposant des micro-prêts pour encourager l'entrepreneuriat dans les milieux défavorisés, en finançant des activités de réinsertion professionnelle, ou dans l'économie circulaire, comme le prouvent les nombreuses « recycleries » et « ressourceries » supposées lutter contre le gaspillage et réduire l'empreinte écologique de la société moderne.

Pour autant, l'économie sociale et solidaire n'est pas la réponse à tous les maux de l'économie actuelle, et fait face à de nombreux défis. Elle peine par exemple à être reconnue et son apport économique et social doit constamment être chiffré pour prouver l'efficacité du modèle auprès du public et des investisseurs. Ceux-ci rechignent encore parfois à placer leur capital dans ces sociétés, pensant à tort qu'ils n'auront aucun retour sur investissement. Enfin, si la gestion démocratique et participative est une bonne idée et fonctionne sur le papier, il arrive que celle-ci se confronte à des exigences de performances et à la compétition avec d'autres modèles ESS.

Mais malgré ces défis, ce modèle représente une très bonne alternative pour concilier le travail du capital de l'économie traditionnelle aux enjeux sociaux et environnementaux modernes, qui sont de plus en plus au centre de toutes les attentions.

Formes juridiques liées à l'économie sociale et solidaire

Les entreprises qui souhaitent souscrire à un mode d'économie sociale et solidaire peuvent prendre de nombreuses formes, souvent citées dans les médias. Coopératives, fondations, associations, sociétés commerciales, banques… Chacune ayant une personnalité et une forme juridique qui lui est propre.

Les coopératives

Dans une coopérative, les membres détiennent collectivement le capital et ont voix au chapitre lorsqu'il s'agit de prendre des décisions, qu'ils soient travailleurs, consommateurs, producteurs… Ces coopératives peuvent elles-mêmes prendre plusieurs formes. Les SCOP, ou coopératives de production, ou les SCIC, coopératives d'intérêt collectif. La différence majeure entre les deux étant la part de salariés prenant part au capital et aux décisions. Majoritaires au sein d'une SCOP, ils partagent cette majorité avec les bénéficiaires et tous les autres partenaires.

Les mutuelles

Les mutuelles sont probablement la forme juridique la plus connue du grand public. Des millions de Français sont en effet affiliés à une mutuelle de nos jours. Ce sont des organismes à but non lucratif gérés par leurs membres selon un principe de mutualisation des risques solidaire. Les mutuelles de santé fournissent, comme leur nom l'indique, des services de santé et de prévoyance, tandis que les mutuelles d'assurance se basent sur le principe de solidarité entre membres pour les assurer.

Les associations

Même si leur impact sur l'économie est moindre, les associations loi de 1901 se basent sur des principes économiques sociaux et solidaires. Les « assos » ont un but non lucratif, souvent d'intérêt général ou poursuivent un but social, culturel, sportif ou environnemental… Leur fonctionnement se fonde sur une adhésion volontaire et libre et une gestion démocratique pour prendre des décisions collectives en assemblée. Il en existe près d'un million d'actives en France.

Les fondations

Moins célèbres en France, mais très répandues outre-Atlantique, les fondations ont pour but de gérer des fonds et donations à des fins d'intérêt général. Elles tendent à financer des activités d'éducation, de recherche, de solidarité… Certaines sont reconnues d'utilité publique et sont même reconnues par l'État et dotées de fonds importants, d'autres appartiennent à des entreprises et leur permettent de financer des actions d'intérêt public.

Les sociétés commerciales

Certaines sociétés commerciales peuvent choisir de suivre un modèle économique social et solidaire en adoptant un statut d'« entreprise solidaire d'utilité sociale ». Elles sont relativement rares pour le moment, mais leur nombre ne cesse d'augmenter pour des raisons de prise de conscience sociale et environnementale.

Les chiffres de l'économie sociale et solidaire

En raison d'une prise de conscience des consommateurs et des investisseurs en ce qui concerne l'importance de développer une nouvelle économie moins agressive, les modèles économiques sociaux et solidaires sont de plus en plus nombreux en France. Particulièrement présente dans le milieu de l'action sociale, cette économie durable y représente 59 pour cent des emplois. Elle séduit de plus en plus les secteurs du sport, des loisirs et des arts, mais peine en revanche à attirer les investisseurs des domaines de la construction et de l'industrie. En 2024, l'on dénombre environ 155 000 entreprises et 213 000 établissements, dont le modèle économique a séduit près de 10 % des salariés français, soit 14 % des emplois totaux du secteur privé. Cela représente près de 2,6 millions de personnes, réparties entre les associations (79 % des établissements ESS), les coopératives, les mutuelles et les fondations.

Le nombre de sociétés ESS a grandement augmenté entre 2021 et 2023, prouvant que ce modèle peut contribuer à l'économie française même en période de crise, lorsque tous les autres secteurs affichent des baisses de régime. Sur cette période de 3 ans, l'on considère que cette économie sociale a contribué à une valeur ajoutée de près de 100 milliards d'euros.

Liste des nouveaux métiers dans l'ESS

L'engagement fort de ces modèles économiques envers des valeurs sociales et environnementales a naturellement engendré l'émergence de nouveaux métiers pour répondre aux besoins particuliers de ces secteurs et soutenir l'innovation sociale, la transition écologique ou encore le développement local. De nombreuses entreprises sont donc à la recherche de chargés de projet en transition écologique. Ce professionnel aide ses employeurs à mettre en place une politique d'écoresponsabilité au travers de diverses actions, comme la collecte et le tri des déchets en entreprise, la recherche d'une plus grande efficacité énergétique (remplacer les ampoules et équipements trop gourmands, installer des minuteurs à la place des interrupteurs…). À travers son métier, il tente de sensibiliser ses collaborateurs et les accompagne dans l'adoption de comportements adéquats.

Les managers de l'innovation sociale sont recrutés pour leur créativité et leur capacité à mobiliser les investisseurs et collaborateurs autour de projets sociaux dont ils ont la charge, tels que des projets de logements sociaux ou d'amélioration des conditions de vie ou de la santé des communautés.

Citons aussi les conseillers en finances solidaires, spécialistes des investissements sociaux qui ont les premiers mis en place les microcrédits. Ils ont un rôle de conseil auprès des entreprises désireuses d'augmenter leur potentiel social. Ils sont souvent recrutés après une formation de bachelor en finance.

Les coordinateurs de coopératives permettent aux modèles participatifs de fonctionner et veillent au respect de la démocratie au sein des coops. Enfin, on remarquera l'émergence d'animateurs de réseau territorial qui mettent en relation les différents acteurs locaux dans un but économique et social et favorisent l'échange avec les sociétés. Leur rôle est très proche de celui de « facilitateur » en entrepreneuriat social, qui accompagne les entrepreneurs qui se lancent dans la création d'un modèle ESS.